En 2018, alors que les ventes de Brico Dépôt augmentent, celles de Castorama décrochent, provoquant la fermeture de quinze magasins en France d’ici à deux ans et le départ de la directrice générale du groupe. La faute au plan Kingfisher One ?
Les résultats de Kingfisher France ont jeté un froid : en 2018, les ventes ont reculé de -3,7 % (à périmètre équivalent, exercice arrêté le 31 janvier 2019), en particulier celles de Castorama qui, en baisse de -7,1 %, ont carrément décroché. En revanche, elles sont légèrement positives pour Brico Dépôt, établies à +0,4 % (à périmètre équivalent). Dans le même temps, c’est-à-dire de février 2018 à janvier 2019, date de clôture de l’exercice du groupe, l’indice GSB/Banque de France évaluait le marché du bricolage à -0,54 % en valeur.
Le prix du plan Kingfisher One ?
Avec le plan Kingfisher One, le groupe a choisi, face au développement d’Internet et à la perte de valeur ajoutée des magasins, la logique financière. Il a massifié les achats et créé ses propres gammes de produits, dites unifiées, car destinées à toutes ses enseignes. Brico Dépôt y a gagné un meilleur rapport qualité-prix et un plan de vente plus abouti (c’est du moins ce que l’on observe au rayon salle de bains). En revanche, Castorama y a laissé des plumes : comptant beaucoup moins de références et de marques, son offre s’est appauvrie. Résultat : Brico Dépôt, qui est monté en gamme, voit ses ventes augmenter et, à l’inverse, Castorama recule, le consommateur ayant perdu ses repères. Au-delà des prix, le modèle Ikea, revendiqué par Véronique Laury, directrice générale (en partance) du groupe, à LesEchos.fr – les mêmes produits dans tous les pays – est-il encore duplicable ? D’autant qu’il s’appuie également sur un style et un concept de points de vente forts.
Kingfisher évoque la baisse du trafic dans les magasins Castorama. Or, tout projet de rénovation débute aujourd’hui sur Internet, où les offres et les positionnements prix sont clairement perceptibles…, entraînant ou pas un achat ou une visite en magasin. Et quand le groupe précise que les ventes des gammes unifiées de meubles de salle de bains et de parois de douche, présentes chez Brico Dépôt comme chez Castorama, progressent (en tout cas au niveau groupe), on ne peut y voir de contradiction : dans ces deux familles de produits, les marques de fabricants ne pèsent pas dans les critères d’achat des consommateurs français étant donné leur peu de notoriété auprès d’eux.
Notons encore que les promesses des deux enseignes françaises du groupe Kingfisher se sont inversées : alors que Brico Dépôt communique aujourd’hui sur sa capacité à accompagner les particuliers porteurs de projets, Castorama s’attache à mettre en avant « les prix bas toute l’année »… Mais, explique encore Véronique Laury à LesEchos.fr : « Brico Dépôt adopte progressivement le même assortiment que Castorama et les mêmes prix », ce qui pose – « sans urgence » souligne-t-elle – la question de la permanence des deux marques. Une question qui agite d’autres enseignes.
L’arrivée annoncée de Screwfix en France
Après avoir fait savoir qu’il quittait la Russie et la péninsule Ibérique, Kingfisher annonce la fermeture de 15 magasins en France d’ici 2020 et de ses 19 magasins Screwfix en Allemagne, précisant que la présence en ligne est maintenue dans ce pays. Cette dernière enseigne, véritable pépite, progresse de +4,1 % au niveau groupe (à périmètre constant), « grâce à des comptoirs spécialisés réservés aux plombiers et aux électriciens, et à une forte croissance numérique, de +19 % », indique le communiqué de presse. Son arrivée en France est annoncée, dans un premier temps uniquement sur Internet.
Repères
♦ Le chiffre d’affaires 2018 de Kingfisher, de 11,7 milliards de livres, soit environ 13,5 milliards d’€, est en baisse de -1,6 % à périmètre constant, tandis que les bénéfices ont été divisés par deux.
♦ Le chiffre d’affaires 2018 de Kingfisher France s’est élevé à 4 272 millions de livres (environ 4 980 millions d’€), en baisse de -3,4 % (-3,7 % à périmètre constant), dont 2 246 millions pour Castorama (2 619 millions d’€, en baisse de -7,3 % et -7,1 % à périmètre constant) et 2 026 millions de livres pour Brico Dépôt (2 063 millions d’€, soit +1,4 % et 0,4 % à périmètre équivalent).
Photo d’ouverture : magasin Castorama de Saint-Nazaire.