LG Industries, un industriel de la douche pas comme les autres

LG Industries est un acteur français fabriquant en Chine, dans sa propre usine, des baignoires et, surtout, des parois de douche – il est l’un des plus gros faiseurs du marché –, pour les enseignes de distribution et leurs MDD, mais aussi, et de plus en plus, pour des industriels européens. Entretien avec Thierry Lelong, son PDG.

Comment devient-on un acteur français fabricant en Chine ?
Thierry Lelong – Nous avons démarré comme trader, c’est-à-dire acheteur. C’était en 2004. Nous cherchions à faire fabriquer la première cabine de douche équipée de parois de fond en verre. Mais le métier de trader est compliqué, pour différentes raisons. D’abord la copie : des gens venus du monde entier visitent les usines chinoises. Ils voient votre produit, le veulent et… l’obtiennent. Ensuite, les prix de vente sont si bas en France que n’importe quel acheteur peut passer devant vous sur la chaîne de production, simplement parce qu’il paie plus cher, et vos délais de livraison ne sont plus respectés. Enfin, si votre fournisseur décide d’augmenter les prix, vous devez fabriquer ailleurs. Dans ce cas, le SAV est impossible à tenir, car la quincaillerie n’est plus la même. C’est pourquoi, en 2008, aidés par la crise, nous avons décidé d’acheter une usine, avec un montage financier adapté au droit chinois. Aujourd’hui nous maîtrisons tout, du personnel au process de fabrication des parois de douche – usinage et trempe du verre, extrusion et anodisation de l’aluminium, découpe laser et pliage de l’inox – avec, à force d’investissements, une production très automatisée.

Pour qui fabriquez-vous ?
Thierry Lelong – Nous fabriquons pour les distributeurs, professionnels ou grand public, qui cherchent des produits exclusifs pour leur MDD. Ils sont nos premiers clients. Grâce à un circuit de décision court, à notre service de R&D basé ici, à Lille, et aux ingénieurs présents dans notre usine, nous allons très vite : à partir d’un cahier des charges, nous sommes capables de mettre un produit en fabrication en six mois, avec les prix de revient les plus bas. Avec notre connaissance du marché, nous apportons de la valeur ajoutée – et pas seulement des marges – aux distributeurs, ainsi d’ailleurs qu’aux fabricants. Car nous travaillons aussi pour des industriels européens, avec lesquels nous co-développons sur l’entrée, le moyen ou le haut de gamme. Il s’agit pour eux de se positionner sur d’autres segments du marché ou d’améliorer leurs marges sans investir dans des machines qui, certes, leur assureraient une meilleure productivité, mais sont coûteuses en Europe.

Vos clients ne sont-ils pas aussi vos concurrents ?
Thierry Lelong – En effet. Tous les grands distributeurs ont des bureaux de sourcing en Chine et des acheteurs en quête du meilleur produit au meilleur prix. Mais notre expertise du marché français nous différencie, de même que notre service clé en main. Nous stockons à Lille, dans notre entrepôt de 12 000 m², les pièces détachées durant dix ou quinze ans, contre deux ou trois ans habituellement. Nous livrons en containers, dédouanés ou pas, sur palettes ou à la petite semaine… Enfin, comme tout industriel, nous savons innover. Les produits que nous nous apprêtions à présenter à ISH 2021 et que nous allons lancer prochainement n’existent nulle part.

Etes-vous un industriel comme les autres ?
Thierry Lelong – Non, nous ne sommes pas un industriel comme les autres, parce que nous avons réduit les coûts directs et indirects au maximum. Nous n’avons ni catalogue, ni marketing, ni commerciaux. C’est d’ailleurs pourquoi, bien que nous disposions d’une marque – Krone –, nous ne cherchons pas à l’implanter dans le négoce. Car on peut être référencé dans une enseigne, s’il n’y a pas de commerciaux qui visitent les showrooms, il ne se passe rien. Cette stratégie nous permet de travailler avec des marges faibles, que des volumes importants viennent compenser.

Vous fabriquez aujourd’hui en Chine, mais demain ?
Thierry Lelong – La Chine est un pays technologiquement avancé, où l’industrie est très robotisée et où les producteurs de verre (float) sont nombreux – donc les prix de revient plus bas… Mais il est vrai que les coûts vont croissant, du fait des salaires qui augmentent tous les ans, des normes environnementales qui se durcissent, du manque de main-d’œuvre lié aux problèmes de logement dans les grandes villes… Mais nous avons encore un peu de temps devant nous, dix ans au moins.