Le design suscite une abondante littérature, inégale. L’ouvrage consacré au design thinking s’affirme d’un intérêt élevé, car s’il en expose le principe, il en décrit surtout, avec une précision documentée, une application connue des professionnels de la salle de bains.
Design thinking ? What is ? Cette conception utilitariste et pluridisciplinaire du design est apparue avec le siècle en Californie, à Palo Alto dans la Silicon Valley, lieu également connu pour son école de psycho-sociologie, initiatrice d’outils pratiques utilisés dans les entreprises, comme l’Analyse Transactionnelle ou la PNL (Programmation Neuro-Linguistique).
Conceptualisée par Ideo (un cabinet de conseil en innovation), cette approche décale l’objectif du design, en centrant toute l’attention sur l’utilisateur dans son environnement, et en faisant prédominer l’aspect économique sur l’artistique. Depuis 2005, ce design particulier est enseigné à la d.school de Stanford, établissement qui a essaimé en Europe.
3 contraintes, 3 phases clés
Le design thinking s’impose d’emblée trois obligations : être désirable pour les utilisateurs, être faisable par les technologies existantes, être viable pour l’organisation qui fabrique/distribue le produit ou assure le service.
Le respect absolu de l’utilisateur implique une compréhension exhaustive du terrain, laquelle se traduit par une culture d’exploration qui nécessite une équipe (transdisciplinaire), des outils et un processus qui se décompose en trois phases :
♦ Phase 1 ou « inspiration » : l’étude du terrain se réfère explicitement à l’anthropologie et se concentre sur les utilisateurs extrêmes afin d’obtenir (par entretiens et observations) un ensemble de données de qualité indiscutable, destiné à devenir source d’idées ;
♦ Phase 2 ou « idéation » : il s’agit de faire éclore et de tester les idées innovantes pour aller vers la solution la plus pertinente, avec un recours au prototypage rapide afin d’économiser du temps et de l’argent ;
♦ Phase 3 ou « implémentation » : délicate car transitoire en vue de l’exploitation, elle intègre en effet toutes les opérations devant aboutir au lancement sur le marché…
Un cas concret : le meuble Concept’Care de Lapeyre
Les trois quarts du livre sont consacrés à l’historique segmenté d’une création : un meuble de salle de bains réellement adapté à la population des seniors, le Concept’Care de Lapeyre. Le lecteur va ainsi « participer » à chaque phase du projet (contact avec un EHPAD proche des d.shools, étude du terrain, entretiens « pas pas »), allant de l’identification des contraintes aux premières idées, puis aux premier prototypes, jusqu’au cahier des charges de la solution retenue. Tout l’intérêt de l’ouvrage est de pouvoir disposer en quelque sorte d’un « discours de la méthode » relatif au design thinking ; un document utile qui n’est pas sans rappeler les recherches ergonomiques de certains précurseurs tel A. Kira.
Florence Mathieu et Véronique Hillen, Le design thinking par la pratique, 160 pages, Editions Eyrolles (22 €).