La tendance explore un nouveau filon issu du gisement minéral exploité par le marché depuis plusieurs années. En parallèle aux grands formats qui imitent la roche naturelle dans son aspect le plus brut, de nouvelles propositions radicalement décoratives font à l’inverse la part belle aux pierres précieuses, réelles ou fantasmées. Avec ces marbres bigarrés traversés de veines aurifères, onyx diaphanes, jaspes sanguins et autres agates nébuleuses, la salle de bains se mue en un luxueux écrin.
Aux antipodes du style minimaliste que d’aucuns perçoivent parfois comme inexpressif et froid, les dalles XXL revisitent les classiques sans pour autant se contenter de les plagier. Il ne s’agit plus seulement de reproduire en surface une quelconque roche, mais plutôt de proposer une véritable plongée au cœur de la matière, avec des coupes de tranches que l’on dirait passées sous la lumière polarisée d’un microscope.
Une cristallisation à la loupe
Ce grossissement inattendu du sujet offre une vision qui n’est que rarement observable à l’œil nu, ce qui renforce son caractère impressionnant. Même si, historiquement, ces décors d’apparat peuvent évoquer des pièces d’exception, comme le fameux cabinet d’ambre offert par le roi de Prusse au premier empereur de Russie Pierre le Grand, leur approche se veut contemporaine plus qu’élitiste. Qu’il s’agisse du revêtement mural en verre Gem Glam Vetrite de Cisis ou de la nouvelle ligne Stone-Air développé par Valmori Ceramica (photo de droite), dépasser la véracité permet justement d’offrir des décors et des couleurs inédits, qu’aucune carrière ou gisement lointains ne saurait proposer.
La nouvelle ère du lapidaire
Jouant sur une échelle des proportions qui placerait en vedette l’infiniment petit, notre coup de cœur du salon s’est justement affranchi de toutes les vraisemblances pour mettre en forme une vision purement poétique : le décor Golden Paint exposé au Cersaie par Casalgrande Padana dans la collection des grands formats Kontinua (photo de droite) n’est qu’une évocation imaginaire de ce qui compose la matière minérale. À la frontière de l’abstraction artistique, ce décor à vocation ornementale impose son originalité par des couleurs chaudes et intenses, des stries dorées parcourant sa géométrie si particulière.
La matière à livre ouvert
Dans cet esprit, la tendance fait la part belle aux structures formées de macro-cristaux. Le décor terrazzo qui signe son grand retour depuis 2016 se décline désormais dans des versions en gros plans ultra graphiques, comme on a pu les découvrir chez Ornamenta, en différentes couleurs alternant petits et grands mouchetés ou chez Sant’Agostino avec Newdecò Palladian, le revêtement de sol/mur en grès cérame effet terrasse vénitienne. La matière peut aussi se lire et se construire à livre ouvert, les jeux de calepinage révélant des zooms surprenants comme avec Suprême, nouveauté 2018 signée Cerdomus (photo ci-dessus).
Le retour en grâce du polissage miroir ?
Par leur incroyable diversité, ces créations n’ont rien à envier aux meilleures collections de roches, minéraux, cristaux, gemmes et autres météorites, comme celle de la galerie de minéralogie et de géologie du muséum d’histoire naturelle de Paris (qui passe pourtant pour un modèle du genre). Qu’il s’agisse de plaques de grès ou même de verre, toutes ou presque s’affichent en finition polie, jusque-là considérée comme moribonde ou destinée au grand export. Le marché serait-il en passe d’acter le retour en grâce du polissage miroir sans fil (expression chère aux gemmologues) ? De nombreuses propositions vont dans ce sens, des gammes Preziosi ou Portoro d’Ava en passant par la ligne Marvel Edge d’Atlas Concorde (photo de droite) ou encore le Cosmic Marble de Diesel Living with Iris Ceramica, le Maximum Marmi Azul Macaubas de Fiandre (300 x 150 cm) et les six nouvelles textures Onici de la gamme Max Fine de FMG, contrebalancées par des propositions qui sacrifient à l’actuelle matité, à l’instar d’Onyx d’ABK. A suivre !