La globalisation a des limites et Kingfisher les a éprouvées. A l’occasion de la publication de ses résultats annuels (et d’un chiffre d’affaires une fois encore en recul, de -1,5 %), le groupe a dévoilé sa nouvelle stratégie : le terrain a son mot à dire. Exit le plan One Kingfisher, place à Powered by Kingfisher.
Massifier les achats peut-être, mais mondialiser les consommateurs, pas encore. Supprimez leurs repères et ils désertent, en particulier les français qui, même s’ils sont en perpétuelle métamorphose – selon les officines spécialisées qui les dissèquent chaque année –, n’en restent pas moins attachés à leurs marques. Ainsi, le chiffre d’affaires des enseignes françaises de Kingfisher, Castorama et Brico Dépôt, a encore reculé en 2019, de -3,2 % pour l’une et de -3,1 % pour l’autre. Et si une hausse remarquable, de +3,1 %, est apparue au cours du dernier trimestre de l’exercice (novembre 2019 à janvier 2020), la part de marché du groupe dans l’Hexagone s’est notablement effritée, passant de 32 % en 2015 à 27 % en 2019.
Retour aux fondamentaux
Mais à nouveau président, nouvelle stratégie. Celle-ci consiste à remettre le client au centre du dispositif tout en cultivant le modèle commercial de chaque enseigne, afin de maximiser leur potentiel. Castorama n’est pas Brico Dépôt, tandis que la marque (ou enseigne ?) GoodHome, née sans avoir véritablement existé, disparaît des radars. « L’échelle du groupe a été préférée par rapport aux besoins des clients. Nous devons changer l’équilibre entre le groupe et ses enseignes, et nous assurer de présenter les marques que les clients recherchent sur chacun de nos marchés. » Un revirement que nombre d’acteurs attendaient, l’ayant depuis le début prédit.
Ce retour aux fondamentaux passe aussi par celui des promotions, les enseignes retrouvant « la liberté de dialoguer avec les clients et de stimuler les ventes. » De nouvelles propositions de services sont également testées. En France, « le déploiement de la plateforme informatique unifiée de Brico Dépôt est suspendu afin de privilégier Castorama. L’équipe dispose désormais d’une plus grande autonomie pour gérer les besoins et exigences métiers des enseignes françaises. »
Act local, think global…
Bien entendu, Kingfisher ne renonce pas à « tirer parti de l’échelle du groupe pour répondre aux besoins des clients qui sont similaires sur tous les marchés. » D’autant que des succès notables ont été enregistrés dans les familles de produits unifiées, comme celles du mobilier de salle de bains, des outils à main et des vêtements de travail, « qui ont généré une croissance des ventes et amélioré les marges dans l’ensemble du groupe. »
Le développement des marques propres va donc se poursuivre, car elles sont différenciantes, mais « chaque enseigne aura un positionnement et un plan d’action propres. » Et le groupe, par sa taille et son expertise, « propulsera » ces enseignes : c’est le Powered by Kingfisher.
Le modèle d’exploitation des magasins est en train d’être repensé. Ceux-ci doivent « être au centre de la proposition de commerce électronique », en servant notamment de plateformes (préparation des commandes, click & collect, amélioration de livraison du dernier kilomètre…). Mais des magasins plus compacts vont être développés, des formats innovants testés, des partenariats étudiés, par exemple les shop-in-shop, les concessions et les franchises.
Des chiffres
♦ Chiffre d’affaires Kingfisher France 2019 : 4,082 milliards de livres sterling (4,520 milliards d’euros).
♦ Les gammes de produits unifiées représentent 39 % des ventes, « le solde étant constitué par les marques locales, nationales et internationales, ainsi que par le no name. »
♦ Au cours de l’exercice 2019-20, les ventes en ligne se sont élevées à 8 % des ventes du groupe, contre 6 % lors du précédent exercice. Le click & Collect a augmenté de 24 %, et représente 62 % du e-commerce (47 % hors Screwfix). La pénétration des ventes en ligne dans les autres enseignes était de 3 %.
♦ Les sites du groupe on reçu plus de 900 millions de visites, mais le taux de conversion est faible, le plus élevé étant observé chez Screwfix.
♦ Kingfisher possède des bureaux d’approvisionnement mondiaux en Chine, dans d’autres pays asiatiques et en Europe. Environ 75 % du coût annuel total des marchandises vendues provient d’Europe, le solde d’autres région du monde, y compris l’Asie.