Durant le Tour de France, Hansgrohe s’affiche pignon sur rou(t)e : Peter Sagan, leader de l’équipe cycliste co-sponsorisée par la marque, témoigne, dans un spot ultra-cadencé, des bienfaits de l’hydrothérapie après l’effort, permettant à la marque de réaffirmer avec force son cœur de métier.
Depuis 2017, Hansgrohe parraine une équipe cycliste à très gros potentiel, en tandem avec Bora, autre fleuron de l’industrie germanique dont la vocation est d’aspirer vapeurs et odeurs de cuisine directement depuis la table de cuisson. Emmenée par son directeur, Ralf Denk, la Team Bora-Hansgrohe compte 27 coureurs professionnels et entend poursuivre sa moisson de victoires. Gageons que sur la Grande Boucle, cette équipe au palmarès déjà impressionnant ne fera pas « ceinture » sur les podiums. Second de la première étape, Peter Sagan a pris sa revanche dès le lendemain en réalisant un remarquable doublé : vainqueur de l’étape à l’issue d’un finish dont il a le secret, le slovaque a raflé le maillot vert et endossé le prestigieux maillot jaune. Un haut en or qui, en ce début d’été, transforme illico son porteur en héros solaire et place son équipe au firmament puisqu’il s’agit du tout premier. Classé second lors de la 4e étape ravie par Gavira, Peter Sagan y a reçu son 89e maillot vert, égalisant ainsi le mythique record détenu par Erik Zabel, l’un des meilleurs sprinters des années 1990 et 2000.
Redécouvrir le plaisir de la douche
Dans un « contre » la montre paradoxalement conçu « pour » montre(r), qui défilera sur les écrans publicitaires de France 2, France 3 et Eurosport à l’occasion du Tour 2018, Hansgrohe boucle son spot en 15 secondes. Les 7 premières défilent à un rythme effréné, illustrant une certaine… vélocité (subs. fém. dont dérive le fameux «vélocipède», abréviation de « vélocifère, voiture publique hippomobile, d’une marche rapide », source CNRTL). Ultra cadencées, les images montrent le triple champion du monde Peter Sagan et récent vainqueur de l’Enfer du Nord (alias Paris-Roubaix) en train de « mouiller le maillot » avant de faire peau nue (et neuve) sous une eau réparatrice, nous invitant à « redécouvrir (à travers lui sinon avec) le plaisir de la douche » puis d’admirer au final « l’eau dans toute sa beauté », signature hédoniste de la marque premium. Un rideau de pluie continue qui en 2 secondes figure un clap de fin qui n’en est pas un puisque ces fines gouttes sont les messagers permanents et universels de l’hydrothérapie et recentrent le propos sur la marque dont c’est le cœur de métier.
Un moment de détente unique
Entre les deux phases, un doigt se pose sur un bouton « Select », objet séparant de façon aussi symbolique que pragmatique (car fonctionnel) l’effort du réconfort. Pivot du film, il est la clef de la détente. Il n’est pas la super-star mais sa récompense ultime, intime même. Un peu comme sur une platine musicale symbolisée par les fonctions « On » et « Off », au « bruit » de la souffrance (et du succès, une arrivée triomphante figurant dans ce clip tout en sueur) succède celui de la régénération. Féerie de l’hydrothérapie, en un clic silencieux comme en un coup de baguette magique, le souffle du labeur (voire de la douleur tant le visage portant les stigmates d’une chute « interpelle » le spectateur de ses prunelles noires, quasi supplicatrices) laisse place à l’émotion pure. La tension physique extrême et la concentration se muent instantanément en relâchement total, à la fois musculaire et psychique. Distribuant l’eau d’une seule pression qui ôte celle qui reposait jusqu’alors sur les épaules du coureur défiant l’équilibre et le bitume, cette « touche confortable » devient la promesse intuitive de « plus de plaisir ».
Douchez-vous comme un champion
Anagramme poétique d’un mot qui donne des ailes, le vélo a beau être le véhicule de la liberté dans l’imaginaire, ce clip lui oppose un univers qui le surpasse en ce domaine : la salle de bains, et plus précisément la douche. L’homme casqué, masqué, ganté, coqué… qui faisait presque corps avec sa machine roulante, telle une biomécanique en quête de « récupération », nous « offre » maintenant le sien. A nos regards du moins car, dans un plan fixe dont la stabilité contraste avec l’enfilade de séquences à toute vitesse, jamais pourtant nos yeux ne croiseront les siens. Nous sommes là, à ses côtés, mais il demeure seul et silencieux, dans une simplicité biblique (quoique abondamment tatoué, donc porteur de messages personnels, dessins, formules…). Le corps, mais aussi l’esprit se défont de leurs carcans. Débarrassé de son armure, le cycliste redevient de chair, toujours fort mais sensible. Ses paupières se ferment alors que sa bouche s’ouvre et sourit, signes d’un abandon en rupture avec ses frénétiques activités et non moins accessoirement les marqueurs faciaux du plaisir. Si ses volumineux biceps témoignent encore de son statut de sportif de très haut niveau, par l’abandon de son « enveloppe » de coureur et autres indispensables protections, Peter Sagan permet au consommateur d’accéder à son statut de titan : « douchez-vous comme un champion » dira avec raison la maxime chargée de créer du lien sur d’autres territoires de communication. Cet espace de bien-être devient alors un « lieu commun », celui du partage d’une expérience qui n’en est pas moins exceptionnelle. « Un moment de détente unique », souligne la voix off.
Un facteur de com et de business
En cela, la douche incarne bien un rituel, le passage d’un état à un autre (tel que le vit Peter Sagan à l’écran) mais aussi le changement de statut du consommateur qui rêve de prendre la place du leader (la seule qu’il peut viser, le terrain de la compétition étant évidemment hors de portée du quidam). Ou comment partager en allégorie le quotidien de ses héros grâce aux systèmes de douche et douchettes Hansgrohe…
Confortée par de très positives retombées en termes de notoriété (spontanée et assistée), Hansgrohe vient d’ailleurs de confirmer son engagement auprès de Bora-Hansgrohe jusqu’à la fin de la saison 2020. En conférence de presse, Philippe Harinck, responsable sponsoring du groupe Hansgrohe, déclarait : « Les éléments dont nous disposons à date, en termes d’impact sur la marque et de visibilité, confirment notre décision. Notre premier objectif en nous engageant dans le sponsoring cycliste était d’augmenter la visibilité de notre gamme premium Hansgrohe auprès de nos consommateurs. Le succès de la campagne publicitaire 2017 (…) nous a permis de booster notre image de marque et d’y apporter une touche d’émotion, tout en faisant progresser notre présence sur des marchés clés, comme la France et l’Allemagne (…). Avec la campagne média 2018 (…), nous continuons à écrire notre success story ! » De l’image donc, mais aussi un facteur de business qui a généré beaucoup d’activité en magasin.
L’opportunité d’une visibilité mondiale
Au-delà de la très populaire compétition cycliste par étapes française qui a connu 105 éditions depuis 1903, Peter Sagan est un ambassadeur de classe internationale pour la société basée à Schiltach, dans la Forêt-Noire. La passion pour la petite reine n’est en effet pas une exclusivité tricolore. Le cyclisme est un sport pratiqué et suivi presque partout dans le monde grâce au World Tour (Bora-Hansgrohe court sous le statut de WorldTeam depuis 2017), même si l’essentiel de l’exposition est surtout lié au Tour, retransmis dans 190 pays (et dont le départ a été décalé d’une semaine pour éviter tout télescopage avec la Coupe du Monde). Les spécialistes du marketing sportif sont formels, mieux vaut investir dans le cyclisme que dans le ballon rond pour voir sa visibilité augmenter. C’est notamment ce qu’il ressort d’une enquête d’A New Agency World parue dans le journal belge « La Dernière Heure » (source Cyclismactu.net) ou de cet article très étayé (source Sport24.lefigaro.fr) dans lequel Yvon Breton, directeur général du groupe AG2R-La Mondiale, affirmait avoir « obtenu 63 millions d’euros en équivalents publicitaires en 2011 (…) pour un budget de 8,3 millions d’euros ». « Comparé à la Formule 1 ou au football, le ticket est raisonnable. De plus, le cyclisme, sport gratuit, développe une proximité affective et géographique : on va sur le pas de la porte des gens », expliquait aussi Philippe Raimbaud, agent et alors directeur du développement de l’équipe Saur-Sojasun (2009-2013).
Des valeurs fortes (et ascendantes)
Si le retour sur investissement du sponsoring semble très enviable, l’entreprise elle-même (et non plus seulement la marque) peut aussi partager des valeurs cardinales avec le cyclisme, à l’instar du sport en général et de la compétition en particulier. Dans son pédalier, le vélo en mode pro entraîne bien des qualités, à commencer par l’excellence, l’exemplarité ou encore le courage et la persévérance. Dans le cas de Hansgrohe, il invite aussi l’individu à se mettre au service d’une équipe et de ses objectifs. Et puisqu’en vélo on roule souvent en peloton, la dimension corporate n’est pas non plus négligeable pour forger un collectif.
Il faut aussi noter l’évolution du statut du vélo qui, passant en « classe affaires », intéresse de plus en plus les CSP++, qui délaisseraient volontiers la petite balle blanche pour la petite reine, faisant dire à Geoffroy Roux de Bézieux, nouveau président du Medef, que «- Bike is the new golf ». Et le prix et les spécificités de ces 2 roues écologiques de grimper aussi sûrement que le col du Galibier… Nombreux seraient les PDG du Cac 40 et autres pépites de l’économie hexagonale à enfourcher leur(s) monture(s) le week-end pour se défier… ou se détendre. Stéphane Richard (Orange), François Davy (Foncia), Marc Simoncini… Créateur de Meetic, ce dernier peut aussi revendiquer la paternité d’Heroïn, « une marque de vélos ultra-haut de gamme tout en carbone vendus de 9 000 à 12 000 euros sur Internet », imaginés et assemblés en France (source Lesechos.fr).
Manifestement, le vélo a le vent en poupe (merci les hipsters), monte en gamme (sans renier ses racines populaires) et suscite des investissements plus importants, portés par de vrais coups de cœur (techniques et esthétiques). Et si la salle de bains bénéficiait elle aussi de cet enthousiasme avec, in fine, une meilleure considération des bienfaits que l’hydrothérapie peut apporter et, pour le fabricant, la valorisation de son savoir-faire, de ses marques et produits ?