Si le laiton compose encore la grande majorité des robinetteries vendues aujourd’hui, d’autres matériaux sont apparus, qui se développent. Le sujet est d’actualité même si, en dehors des spécialistes de l’inox, les industriels se gardent bien de le mettre sur la table…
Du fait des règlementations sanitaires, des coûts croissants des matières premières et des prix en recul constant des produits finis, le laiton ne règne plus en maître sur le marché de la robinetterie. Mais cette (r)évolution se fait en silence, car le sujet est tout aussi stratégique que délicat, tant le laiton est installé dans l’esprit des consommateurs et des professionnels, et la qualité perçue des produits fortement liée à leur poids. Malgré tout, d’autres matériaux apparaissent, pour le meilleur comme pour le pire…
Le laiton : noble, mais discuté du point de vue sanitaire et de plus en plus cher
Si le laiton a traversé plus que le XXe siècle, ce n’est pas par hasard. Entre autres avantages, il est aisément transformable, que ce soit par coulage, offrant ainsi une grande liberté esthétique, par matriçage (forme imprimée sur la matière chauffée pour être ramollie) et décolletage (enlèvement de matière).
Mais cet alliage a deux inconvénients : en plus de 30 % de zinc, il renferme 60 % de cuivre, dont le prix ne cesse d’augmenter (en particulier en ce début d’année 2021). Mais il contient aussi du plomb (pour la ductilité), à raison de 2 à 3 % hier, réduits à 1,6 à 2,3 % aujourd’hui, pour des raisons sanitaires. Toutefois, aux Etats-Unis par exemple, où la règlementation est nettement plus exigeante, c’est encore trop : dans les corps des robinets, l’eau circule à l’intérieur d’une canalisation en matériau de synthèse, lequel est tout aussi contrôlé que le laiton…
Ces questions de coût et d’innocuité – celle-ci, nous dit-on, n’étant pas garantie sur les robinetteries en laiton produites en Asie – conduisent les fabricants à rechercher et tester d’autres matériaux, voire à en utiliser plusieurs. C’est le cas, par exemple, lorsque le mitigeur de douche intègre une tablette : le corps du robinet dans lequel l’eau circule est en laiton à basse teneur en plomb, mais l’étagère qui le prolonge est en zamak ou en matériau plastique (coque).
L’inox : haut de gamme, mais limitant les possibilités esthétiques
C’est le danois Vola qui, le premier, a fabriqué des robinetteries en inox. Depuis sont apparus CEA Design (le leader en termes de chiffre d’affaires), Cristina, Fantini, Gessi, Horus, Perphorma, Treemme… Il faut noter que les industriels ayant choisi de travailler ce matériau à l’exclusion de tout autre sont à la fois rares et petits. Les leaders de la robinetterie le tiennent en effet à distance car il n’est pas compatible avec les productions en grandes séries. Toutefois, de nombreux produits chinois sont présents sur le marché.
Pourtant, l’inox a des atouts : il est recyclable, inoxydable (quand il est de qualité) donc totalement adapté du point de vue sanitaire, peut rester brut ou simplement poli et satiné, et accepte tous types de finitions PVD, appliquées en direct, contrairement au laiton qui, avec ses microporosités de surface, nécessite un nickelage préalable.
Côté inconvénients, le coût n’est pas le moindre, ainsi que les possibilités esthétiques réduites : d’une part du fait de la dureté, qui implique des temps d’usinage importants quand on travaille en évidant une barre (car on peut aussi procéder par soudure de deux coques formées par emboutissage), d’autre part parce que l’inox n’étant pas coulé, les designs sont limités. De fait, les robinetteries en inox, excessivement épurées, se ressemblent beaucoup. En attendant que les nouvelles générations de machines outils élargissent le champ des possibles, les industriels, pour se différencier, jouent avec les surfaces (mates, polies, brutes, guillochées…) et la couleur (des poignées, du flexible de douche…).
Deux types d’inox alimentaire sont utilisés en robinetterie : le 304 et le 316. Le premier est moins résistant à la corrosion que le second, à privilégier dans les ambiances corrosives (bord de mer, piscine…).
Le zamak : un matériau bas de gamme qui gagne du terrain
C’est en toute discrétion que les robinetteries en zamak – alliage composé de zinc, d’aluminium, de magnésium et de cuivre –, se sont glissées dans les catalogues. Certes, le matériau, aisément coulé sous pression, n’est pas nouveau dans l’univers sanitaire. Il constitue depuis longtemps les leviers et autres manettes, ainsi que les mitigeurs électroniques, à l’intérieur desquels capteur et électrovanne sont intégrés. Mais il n’est pas rare désormais qu’il remplace le laiton, en particulier sur les séries à volume des grandes marques, venues d’Asie quasi systématiquement (Vietnam notamment). Mais il existe aussi des robinetteries en zamak qui s’inscrivent dans le cœur du marché, permettant à ces industriels non plus de maintenir leurs marges, mais de les augmenter. Pourtant, nulle mention de ce matériau dans les catalogues, où l’on préfère indiquer métal plutôt que zamak.
Car, par rapport au laiton, le zamak, bas de gamme, n’est pas fait pour durer. S’il est recyclable, il n’est pas de qualité alimentaire. En effet, il s’oxyde, formant un dépôt blanc appelée rouille blanche selon Wikipedia, et qui interdit tout contact direct avec l’eau potable. C’est pourquoi, à l’intérieur des corps des robinets en zamak, celle-ci circule dans une canalisation en élastomère (EPDM ou NBR), dont l’étanchéité doit être assurée tout le long du parcours et… de la durée de vie du produit.
Le polymère : très peu présent
A notre connaissance, un seul mitigeur en polymère a été commercialisé jusqu’à présent : le modèle sans contact Bau Cosmopolitan E de Grohe. Mais le fabricant n’ayant pas souhaité répondre à nos questions, difficile de développer le sujet. Pour l’instant.
Photo : becs en laiton coulé, usine Stella, Italie 2017 (©Sdbpro).