Alors que le déploiement rapide des marques de distributeurs inquiète les industriels, Sylvain Bernard, directeur marketing et achats de Téréva, fait le point sur Aquance qui, exposée dans tous les points de vente de l’enseigne, propose aux installateurs une offre complète de salle de bains.
Sdbpro – Quelle différence faites-vous entre une marque propre et une MDD ?
Sylvain Bernard – Une MDD est plus opportuniste, conçue pour faire du « générique » sans cohérence de gammes. Avec Aquance, nous avons construit une offre qui intègre tous les produits de la salle de bains et tous les niveaux de prix. Nous investissons beaucoup sur cette marque, notamment humainement. Une équipe de neuf personnes lui est dédiée, dont un directeur de marque – Eric Leroux – et sept animateurs qui agissent à la manière d’une force de vente, se déplaçant dans nos agences, vérifiant les expos, visitant les clients, formant à la pose des produits… Ils animent également les stands Aquance sur les salons régionaux auxquels nous participons, tels Artibat ou Nordbat.
Aquance a donc vocation à devenir une marque de salle de bains ?
Sylvain Bernard – En effet. Aquance est pour nous un vecteur de différenciation, une marque avec laquelle nous pouvons raconter une autre histoire. Elle est aussi un puissant moteur de motivation et d’entraînement des équipes sur l’ensemble de notre réseau. Elle permet de défendre notre rentabilité et de maîtriser notre politique tarifaire, tout en offrant à nos installateurs la possibilité de proposer un meilleur rapport qualité/prix à leurs clients finaux, avantage essentiel lorsque le pouvoir d’achat des Français se contracte. Aquance, c’est aussi une promesse importante de qualité de service avec 95 % des produits stockés et livrables à J+1. Enfin, sous cette marque, nous pouvons développer des positionnements de marché non ou mal exploités par les fabricants : par exemple les colonnes de douche avec tablette ou la robinetterie couleur à prix acceptables ou bien, à une époque plus lointaine, les packs WC économiques…
Sur une échelle de 1 à 5, où en êtes-vous de son déploiement ?
Sylvain Bernard – Disons à 3,5 ! La phase de développement est terminée, durant laquelle nous avons conçu l’offre, jusqu’au sèche-serviettes et à l’éclairage. L’objectif pour les prochaines années est de différencier visuellement les produits, qui doivent être totalement exclusifs, voire fabriqués exclusivement pour nous. En robinetterie par exemple, cela peut passer par des moules propres à Téréva, comme c’est déjà le cas avec notre gamme Sodi. Enfin, nous devons encore asseoir la marque chez nos clients, afin qu’ils l’intègrent comme faisant partie du paysage du sanitaire.
Quels sont vos objectifs en termes de parts de marché ?
Sylvain Bernard – Les objectifs sont très variables d’une famille de produits à l’autre. La part de marché Aquance en bâti-supports ne sera pas celle obtenue avec les parois de douche, famille où la puissance des industriels est sans commune mesure, ainsi que vous le souligniez dans un récent article. Il ne s’agit pas pour nous de tout faire en marque propre. Nous avons toujours dit que nous laisserions un territoire d’expression important aux marques, à condition qu’elles soient notoires, à valeur ajoutée, désirées par le particulier ; qu’elles sachent communiquer sur le web pour nous apporter des leads… C’est possible et certaines marques « premium » y parviennent et cohabitent ainsi efficacement avec la nôtre.
Sans trahir de secrets, je peux toutefois vous confier que notre croissance est à deux chiffres depuis deux ans sur nos marques propres et que Aquance est dorénavant la première marque de Téréva en sanitaire, avec sept points de parts de marché de plus que les deux suivantes.
N’est-ce pas beaucoup demander à des marques souvent inconnues des consommateurs ?
Sylvain Bernard – Si une marque n’est pas suffisamment innovante, notoire, différenciante pour être réclamée par l’installateur ou le client final, le distributeur n’est pas responsable. Chez Téréva, il nous est arrivé deux fois de changer notre premier fournisseur de céramique en quelques mois, sans difficultés majeures. Ce qui serait beaucoup plus ardu dans le secteur du chauffage, où les marques sont globalement plus puissantes, même si la révolution du génie climatique rebat les cartes et les équilibres de pouvoir entre les marques, mais aussi entre celles-ci et les distributeurs. Le challenge pour les marques de la salle de bains est d’être identifiées, visibles et demandées par le particulier porteur d’un projet de salle de bains. Elles doivent jouer leur rôle afin de le détourner des produits « no-name » et souvent peu qualitatifs qui foisonnent sur Internet. Les marques doivent devenir des repères, être incontournables…
D’où proviennent les produits Aquance ?
Sylvain Bernard – Nous privilégions la France, puis l’Europe, en espérant que cela reste possible même sur le segment chantier avec des prix sans cesse plus tendus. Avec le Covid-19 et les mouvements sociétaux actuels, on s’aperçoit que cela a de la valeur d’écrire « made in France » ou « made in Italy » sur nos produits. Qualitativement, souvent, il y a encore une différence… D’autant que la qualité perçue est challengée par les installateurs et les limites acceptables par un distributeur professionnel sont vite atteintes, que ce soit en termes d’épaisseur des matériaux, de respect de normes, de finitions ou de SAV. D’autre part, il est plus simple de fabriquer en Europe, ne serait-ce que pour se rendre dans l’usine afin d’arbitrer, valider et contrôler les produits durant leur durée de vie. Après, pour certaines gammes, notamment l’hydrothérapie, le principal pays de production est la Chine et heureusement, il existe aussi des produits « chinois » d’excellent niveau. Tout réside dans le degré d’exigence de la marque !